Ibtissame Lachgar, militante féministe marocaine, condamnée en appel à 2,5 ans de prison pour atteinte à l’islam
Confirmation en appel d’une peine de 2,5 ans de prison
Un tribunal de Rabat a confirmé, lundi en appel, la peine initiale de 2,5 ans de détention prononcée contre Ibtissame Lachgar, militante féministe marocaine, pour des accusations liées à l’atteinte à l’islam.
Les faits reprochés et le contexte
Âgée de 50 ans et reconnue pour son engagement en faveur des libertés individuelles, elle a été arrêtée cet été après la diffusion sur les réseaux sociaux d’une photo la montrant portant un t-shirt sur lequel figurait le mot « Allah » suivi de l’expression « est lesbienne ». Le texte accompagnant l’image évoquait l’islam — comme toute idéologie religieuse — et le qualifiait de fasciste, phallocrate et misogyne.
Le déroulement du procès et les réactions
Lors de l’audience, Sihar Lachgar, l’une des sœurs de la militante, a éclaté en sanglots à l’énoncé du verdict. La défense a indiqué son intention de solliciter un aménagement de peine pour obtenir une peine alternative et de former un pourvoi en cassation. L’avocate Me Ghizlane Mamouni a souligné les difficultés de santé de Lachgar et plaidé pour qu’elle bénéficie d’un traitement plutôt que de la détention, soulignant qu’elle est en rémission d’un cancer et porte une attelle au bras gauche.
La publication avait suscité des réactions sur Internet, avec des appels à son arrestation ainsi que des menaces de viol et de lapidation.
Cadre pénal et suites possibles
Outre la peine d’emprisonnement, Lachgar a été condamnée à une amende d’environ 5 000 euros pour « atteinte à la religion islamique ». L’article 267-5 du Code pénal marocain prévoit une peine de six mois à deux ans de prison ferme pour quiconque porte atteinte à la religion musulmane, peine pouvant être portée à cinq ans lorsque l’infraction est commise en public, y compris par voie électronique.
Hakim Sikouk, président de la section Rabat de l’Association marocaine des droits humains (AMDH), a déclaré que la condamnation portait atteinte, selon lui, à la liberté d’expression et qu’elle n’avait commis aucun crime dangereux pour la société.
Parcours et engagement public
Co-fondatrice en 2009 du Mouvement alternatif pour les libertés individuelles (MALI), Lachgar est à l’origine de campagnes médiatisées contre les violences faites aux femmes et la pédocriminalité. Human Rights Watch avait appelé, à la mi-septembre, à l’annulation de la peine, qualifiant le jugement de coup dur pour la liberté d’expression au Maroc.